Archives du mot-clé maradona

L’Allemagne est impitoyable, Thuram aussi

Je ne sais par quoi commencer. Après tout, je n’ai qu’à me coucher et ne rien écrire. Impossible, un truc bizarre me pousse vers mon clavier. Ah, voilà, je sais ce qui me tracasse. J’ai un goût amer quelque part au fond du gosier.

En rugby, le Ghana se serait qualifié…

Ces dernières quarante-huit heures, la Coupe du monde m’a pourtant remué et c’était la première fois depuis son coup d’envoi. Du spectacle, de l’émotion, et du risque… enfin. Mais de voir Ghana-Uruguay se terminer par une… main volontaire d’un des meilleurs attaquants du monde, Suarez, sur sa propre ligne de but… J’ai un peu la nausée. En rugby, la conclusion aurait été toute simple, c’était l’essai de pénalité pour l’adversaire. Et la victoire du Ghana, puisque les cent vingt minutes étaient écoulées. Et Suarez est aujourd’hui un héros en Uruguay ! Pour avoir délibérément fait acte d’antijeu. Oui, ça me chiffonne, sérieusement.L’Allemagne a écrabouillé l’Argentine. J’ai envie de dire que l’humilité a vaincu la suffisance, à l’image des deux entraîneurs, Löw le discret et Maradona le hâbleur. Quel travail d’un côté et quel gâchis de l’autre. Tout s’est ressenti dans la physionomie du match et dans les mouvements des joueurs. Messi partait de son camp pour aller systématiquement s’écraser sur le mur du bunker quand Thomas Müller et ses coéquipiers, dignes héritiers de la Mannschaft de Beckenbauer, se trouvaient les yeux fermés.

Quand à l’Espagne, ses grands artistes me semblent de plus en plus hésiter avec leur pinceau. Les couleurs sont moins vives. Ce fut un tableau sans grande inspiration qu’ils ont produit face au Paraguay, qui aurait pu rafler la très grosse enchère si Cardozo n’avait failli sur penalty en fin de match.

Thuram, droit au but…

Pour conclure sur une note non équivoque au sujet de la Coupe du monde… française, et son dernier épisode en date, celui de l’intervention quelque peu musclée de Lilian Thuram sur la débâcle bleue, je dois dire qu’elle a pour moi le mérite de la clarté. Dans l’embrouillamini des déclarations de ces derniers jours, des annonces alambiquées des autorités gouvernementales ou des décisions ubuesques de la Fédération, la position du recordman des sélection et aujourd’hui membre du conseil fédéral de la FFF, ne prête pas à la combine ou aux faux semblants. Les coupables doivent être punis. Voilà qui est dit et qui devrait être fait.Je préconise enfin une autre solution, à mon avis tout aussi efficace, pour punir Evra, Abidal, Ribéry et Cie: visionner en boucle Allemagne-Argentine durant un mois entier et copier cent mille fois « Maintenant, je ferai comme Müller, Klose, Schweinsteiger…« 

Coupe du monde, souvenirs subjectifs (6/10)

Le 11 juin, coup d’envoi de la dix-huitième Coupe du monde de football. D’ici là,  je vais essayer de vous en raconter dix épisodes qui m’ont particulièrement marqué… 1986. C’est l’année où toute la France y croit. La Coupe du monde ne doit plus être un rêve. En 1978, les Bleus ont bien joué mais ils étaient trop tendres. En 1982, ils ont encore mieux joué mais la fameuse culture de la gagne était en demi-finale du côté de ces maudits Allemands. Et puis en 1984, la guigne avait enfin changé de camp. Moi, je n’avais connu que ça, les poteaux carrés, les défaites à pleurer, les occasions manquées, le ballon qui part toujours du mauvais côté. Bref, la mouise éternelle. Là, à Paris, à Saint-Etienne, à Marseille, et encore au Parc, ce Championnat d’Europe, il avait été bleu. de bout en bout. La déveine, c’était pour les autres.Et puis, il y avait eu Michel Platini. Platoche, comme on disait. Les Français n’en revenaient pas. En cent ans, ils n’avaient jamais vu dans l’hexagone un tel enchanteur. Tout, il savait tout faire avec le ballon. Et ce qu’il faisait le mieux, c’était encore de le propulser au fond des filets. Neuf fois pendant l’Euro, du premier jour jusqu’à la finale. Le plus formidable gagneur de l’histoire du sport tricolore avec Jean-Claude Killy. Certains allaient jusqu’à en ironiser, à ne pas en faire un Français à part entière en pointant du doigt ses origines italiennes.Pour la première fois de l’histoire du jeu, la France débarquait en favorite d’une Coupe du monde. Au Mexique, les medias présentaient même Platini comme le meilleur joueur de la planète, à égalité avec Maradona. Et La 5, toute nouvelle venue dans PAF avait fait la nique à la Une et à la Deux en retransmettant les deux ou trois matches de préparation des Bleus dans les jours précédant le premier match de compétition. L’occasion de constater que le numéro 10 de la Juventus semblait quelque peu en-dessous de son niveau.

Platini a joué sur une jambe…

Ce fut en réalité le drame de l’équipe de France. Un drame caché. Platini était en réalité blessé. Ses adducteurs, sollicités à bloc depuis quatre ans à la Juve, le faisaient terriblement souffrir. Il avouera ensuite avoir « joué sur une jambe » depuis des mois. Et plutôt que de déclarer forfait pour le Mondial, l’équivalent d’une catastrophe nationale, Michel avait accepté de se faire traiter par des anti-inflammatoires « très sévères ». Le grand public n’en avait rien su. Les adversaires non plus évidemment. Bien sûr, devant mon écran, j’avais remarqué match après match que notre capitaine n’accélérait jamais franchement, qu’il n’allait pas toujours au bout de ses actions. Mais, comme les autres, je me disais qu’il s’économisait.

Le plus surprenant, c’est que ce Platini amoindri a bien failli emmener le pays vers le Graal. Failli seulement. Après des qualifications face à l’Italie et au Brésil, en huitièmes et en quarts de finale, l’Allemagne était encore passée par-là…

Coupe du monde, souvenirs subjectifs (5/10)

Le 11 juin, coup d’envoi de la dix-huitième Coupe du monde de football. D’ici là,  je vais essayer de vous en raconter dix épisodes qui m’ont particulièrement marqué…

Maradona n’était pas comme tout le monde…

Avec la Coupe du monde, tout est amplifié, magnifié. Rien n’a changé d’ailleurs car, comme dans l’Antiquité au moment des Jeux, l’exploit se grave dans la légende. Un peu plus vite, certes. La télévision a remplacé les conteurs ou les poètes. Et les héros des odes d’hier sont les stars des écrans d’aujourd’hui.De 1982 à 1994, soit quatre éditions, Diego Maradona aura tout fait pour devenir le plus fabuleux mais aussi le plus controversé des joueurs de football. Du génie au pathétique. Du grand au tout petit. C’est simple, l’Argentin a fait naître à lui seul un parfait condensé des bonheurs et des afflictions que ressentent les amoureux de ce sport.

Le meilleur, il l’a produit en 1986. Son apogée. De l’art. Un but face à l’Angleterre en quarts de finale 1986 qui fit penser à beaucoup que Pelé lui-même n’était plus qu’un roitelet. Et des dizaines d’autres gestes, de passes, de frappes, d’inspirations qui firent de lui l’astre le plus brillant de la galaxie foot.

Le pire, Maradona ne semblait pas le craindre. Dans ce même quart de finale 1986, il avait marqué de la main. Ni regrets ni remords. C’était la main de Dieu. Diego ne cherchait visiblement pas la reconnaissance universelle. Ce qu’il voulait c’était plutôt atteindre ses buts à lui. A sa façon. Peu lui importait que cela ne plaise pas à tout le monde.

Dès sa première apparition dans un Mondial, en 1982, il s’était fait expulser. Maltraité par les Italiens, il s’était vengé. Sans réfléchir. Sa manière à lui de faire justice. Carton rouge. Mais le plus terrible fut sa dernière sortie en Coupe du monde en 1994. Déjà diminué par les fatigues de l’âge, les excès en tout genre, le Pibe de Oro avait voulu redevenir un athlète. Toujours à son idée. Il a trompé le monde comme sa propre personne. Viré de la Coupe du monde pour prise de produits dopants. Interdit. Pas pour lui.

Génie, Messi, vici !

Voilà. C’est inscrit dans le marbre depuis mardi soir. Un nouveau nom a été inscrit dans la légende du football, celui de Lionel Andrés Messi.Ce football, année après année, se nourrit d’un peu de tout. Et comme l’Histoire, il passe sans prévenir de l’anecdotique au mémorable et atteint, parfois, au grandiose.Sur la pelouse du Camp Nou à Barcelone, ce 6 avril 2010, un petit homme a, à l’évidence, accompli une œuvre gigantesque avec ses quatre buts d’affilée contre Arsenal. Une prouesse qui se figera longtemps, très longtemps, dans la mémoire universelle. Car s’inscrivant de surcroît dans le prolongement des exploits de l’attaquant argentin depuis au moins deux saisons. Mais jamais à cette altitude-là, à ce point de perfection, à ce niveau de facilité.Messi n’a pas seulement marqué des buts. Il a, par ses dribbles, ses frappes, ses lobs, ses contrôles, provoqué la stupeur, l’admiration, les questions même. De même que devant un tableau ou une statue des plus fameux artistes du Louvre, chacun s’interroge. Comment le peintre ou le sculpteur procède-t-il pour susciter une telle émotion? Pas de vraie réponse. En faut-il ?Crier au génie est-il alors saugrenu ? Comme l’ensemble des observateurs avisés ou non, c’est en tout cas l’unique attitude que j’ai su exprimer devant mon téléviseur (avec celle, tout autant subliminale, de l’intervention divine, exprimée dans un post précédent). En pareil cas, je ne peux m’empêcher de me livrer au jeu si fascinant des comparaisons avec les étoiles du passé: Di Stefano, Cruyff, Pelé, Maradona, Zidane… On n’a pas fini de (bien) faire  tourner un ballon…

Coupe du monde, souvenirs subjectifs (2/10)

Le 11 juin, coup d’envoi de la dix-huitième Coupe du monde de football. D’ici là,  je vais essayer de vous en raconter dix épisodes qui m’ont particulièrement marqué…

La main de Marius

1978. Enfin une équipe de France. Vingt ans qu’on attendait ça. En tout cas, moi, en cette année de mes quinze printemps, je n’avais jamais vu de ma courte vie des coqs, comme on les appelait alors, aussi chantants. A vrai dire, jusque-là, je ne m’y intéressais pratiquement pas. Tout bêtement parce que cette équipe de France de foot, elle n’existait pas, réduite au rang de faire-valoir sur l’échiquier international. A cette époque, j’achetais L’Equipe sur le chemin de l’école, uniquement pour lire les papiers sur Saint-Etienne. Les Verts, ça, j’en rêvais la nuit. Rocheteau, Piazza, Curcovic, les frères Revelli, Bathenay

Et donc, ces Verts, qui accumulent les prouesses, voire les miracles, notamment en Coupe d’Europe, arrivent vite en sélection. A la tête de celle-ci, un petit bonhomme qui ne paie pas de mine, Michel Hidalgo, un ancien ailier du grand Stade de Reims, a succédé à Stefan Kovacs. Et avec les Stéphanois, déboule un nouveau jeune très prometteur, Michel Platini. Il sait tout faire avec un ballon le bougre, dribble comme Pelé, shoote comme Eusebio, frappe de la tête comme Kocsis et tire les coup francs comme… personne avant lui. Les Bleus, ça y est on les appelle comme ça, font une campagne de qualification pour la Coupe du monde en Argentine qui passionne le pays, enfin. En Bulgarie, Thierry Roland pète même un câble en commentant une décision de l’arbitre Mr Foote, le traitant de salaud ! Mais les Français sauvent l’essentiel (2-2). Et arrachent leur billet au match retour, Platini marquant le deuxième but (3-1).

7 juin. Buenos Aires. Deuxième match de poule des Français face à l’hôte argentin de ce Mondial. Une ambiance délirante, à faire peur. Et tous les problèmes extra-sportifs qui passent en cet instant par la tête des joueurs tricolores. Des familles françaises ont menacé Hidalgo et sa troupe pour les contraindre à parler en public du problème des personnes disparues ou enfermées par le pouvoir dictatorial argentin. Les joueurs ont voulu faire valoir leurs intérêts et ont recouvert leurs chaussures de peinture au premier match, perdu contre l’Italie, pour que l’équipementier, Adidas, revoie ses primes (ridicules) à la hausse.

Devant la télévision, je n’ai pas bien conscience de tout ça, je m’en fous d’ailleurs. Je ne me préoccupe pas à l’époque de la politique sanglante du général Videla ou des états d’âme de Jean-Marc Guillou (meneur dans l’affaire des trois bandes). Il n’y a qu’une victoire contre l’Argentine qui m’obsède. La France tient la dragée haute aux favoris de cette Coupe du monde. Plus que ça, elle est belle, magnifique. Les Sud-Américains, qui n’ont pas sélectionné le tout jeune Diego Maradona, sont, c’est un comble, déstabilisés par la virtuosité des Platini, Michel, Rocheteau ou Six. Ils ont recours à leurs vieilles ficelles, dureté sur l’homme et truquages continuels. Il reste une poignée de secondes avant la mi-temps. Kempes s’infiltre sur la gauche dans la surface, à la lutte avec Marius Trésor. L’avant-centre ciel et blanc centre comme il peut. Trésor s’interpose en se jetant de tout son corps sur le ballon, son bras gauche traînant sur le côté. Marius a toujours les bras écartées, c’est sa marque de fabrique, une sorte d’équilibre naturel. Il est l’homme qui rassure la défense française. En forme, le Guadeloupéen est le meilleur à son poste, toutes nations confondues. La balle est déviée par la main de Trésor. L’arbitre suisse M. Dubach interrompt l’action en sifflant. Les joueurs français, comme un seul homme, se dirigent vers lui, contestant une faute volontaire de leur libero. Je n’en reviens pas non plus, il ne peut pas y avoir penalty, c’est impossible. La caméra se focalise sur l’homme en noir, qui va voir son juge de touche, un certain M. Winseman, Canadien de son état. Deux francophones. Ils vont se parler en français, pas de doute, et le second va rétablir la vérité, je n’en doute pas. Tout va s’arranger entre gentlemen soucieux de justice terrestre. M. Dubach repart vers la surface de réparation, il va bien entendu donner une remise en jeu pour la France. Quoi ? Mais non, c’est penalty. M. Dubach dira plus tard qu’il a simplement vérifié auprès de son assistant (comme on dit maintenant) si le ballon n’était pas sorti, et qu’il avait bien vu la main de Marius auparavant. M. Dubach, tu es un salaud, crie-je !

Passarella transforme (1-0). Pas de panique sur le radeau bleu. Platini égalise en seconde période. C’est certain, on va quand même gagner. On est les plus forts. M. Dubach ne siffle pas un penalty sur Six, au moins aussi évident que l’autre. Le même Six se présente seul devant Fillol, le ballon glisse le long du poteau gauche… L’Argentine nous assassine un quart d’heure avant la fin du match, par Luque, le pirate. Elimination. Déception. Frustration. Et école le lendemain matin. Cours de maths. Equations sans solutions.