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Lièvremont, l’anti-Domenech

On les a un temps comparés. Dans leurs attitudes et dans leur façon de faire. Moi le premier.Mais alors que l’un, Raymond Domenech, semble plus que jamais s’enfermer dans sa prison d’idée(s), l’autre, Marc Lièvremont, a eu, je ne sais pas vraiment comment, la lucidité de se libérer lui-même – tel Houdini – de son carcan.

Alors que Raymond se cabre devant le flot des critiques et s’entête à faire jouer les Bleus à contre-emploi, Marc a ravalé ses schémas initiaux d’entraîneur libertaire et fait évoluer ses méthodes de travail et même sa communication. Ses échecs, même s’ils ont alterné avec des coups d’éclat, l’ont certainement fait réfléchir. Et ses joueurs l’écoutent autant que l’inverse.

Oh, bien sûr, il s’est obstiné. Contre vents et marées, pendant deux ans, il a voulu battre tout le monde avec du beau jeu. Sans vrais résultats. Mais contre vents et marées aussi, il n’a pas dérogé à ses certitudes nées de ses années d’entraîneur des petits Bleus (comme Raymond !) et de Dax. On construit une équipe avec des bases. Avec une charnière Parra/Trinh-Duc par exemple, bien longue à devenir complémentaire mais à force de travail enfin clé de voute de l’édifice. Et surtout en s’armant d’un formidable paquet d’avants d’une quinzaine d’unités presque interchangeables. Merci au discret Didier Retière.Rien n’est définitif, certes, mais le Grand Chelem acquis samedi contre l’Angleterre, est évidemment un pas supplémentaire de franchi vers le chemin de la Coupe du monde 2011, objectif suprême. Mais, comme je le disais hier, que la route est longue avant le match d’ouverture contre la Nouvelle-Zélande dans son jardin ! Il reste deux tournées et un Tournoi.

En tout cas, dans trois mois on aura une première réponse. Raymond est-il le plus grand incompris de l’histoire du foot français ? Ou non.

Surtout ne regardez pas France-Angleterre !

It’s a joke indeed !Mais peut-être pas tant que ça. Voyons un peu plus loin que ce 93e France-Angleterre.

Que le XV de France l’emporte en raflant son neuvième Grand Chelem, et les louanges s’amoncelleront dans la presse et aux zincs des bistrots. Avec ça, Marc Lièvremont sera bien avancé à dix-huit mois de la Coupe du monde en Nouvelle-Zélande ! Les Grands Chelems tricolores n’ont jamais abouti à une victoire dans un Mondial. On se reposera sur des pseudo-vertus (ah, la conquête !) qui se seront évanouies dans un an et demi. Bref, vous vous enflammeriez pour rien !

Que le XV de France perde face à celui de la Rose et le sélectionneur sera livré aux chiens ! Oubliés les quatre premiers matches convaincants du Tournoi 2010. Tout à refaire. Et les sempiternelles questions à résoudre : ParraTrinh-Duc charnière ad hoc, Jauzion ou pas Jauzion, Médard ou Poitrenaud à l’arrière, Chabal titulaire or not,  jeu d’occupation ou jeu d’attaque… Bref, vous vous mettriez la tête à l’envers sans rien arranger !

Bon mais alors. Il sert à quoi ce Crunch ? Hormis ce qui nourrit la fantasmagorie ambiante, autrement dit les vieux poncifes d’après-match des intéressés ou des medias selon le résultat (« Un groupe est né », « Il reste beaucoup de travail », « Ces Bleus peuvent y croire » ou « C’est pas gagné »), à pas grand chose. Il reste trop de temps avant la grande échéance de 2011.

Allez, j’exagère évidemment. Ce serait une joie non dissimulée que les descendants de Jeanne d’Arc (ok, ok !, elle était pucelle) fassent ravaler leur morgue (« Sorry good game ») à ceux des Tudor. Mais, et je me mords les lèvres en l’écrivant, une petite leçon d’Assimil (in english of course) à Saint-Denis ne serait pas si lourde de conséquences. Un genre de petit coup de pied au cul, quoi. Surtout pour fouetter les sangs qui abreuvent les sillons de l’espoir. Et que l’an prochain, au pays du Long Nuage Blanc, le jour de gloire arrive…