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La passe décisive à Ribéry de la ramasseuse de balle patriote

Dans ces temps incertains où les valeurs se perdent et se confondent dans la mondialisation ou les querelles de civilisation, il reste quand même dans notre vieux pays des bons petits bien obéissants et à qui on remettrait bien une grosse médaille rien que pour ça.

Une jeune ramasseuse de balle de France-Biélorussie s’est offert ce mardi un moment de gloire peu commun dans la lumière un peu terne du Stade de France. Et qu’elle racontera à ses arrière petites filles dans un demi-siècle au coin du feu quand les Bleus auront huit étoiles sur leur maillot. Ludivine, la bien nommée, se trouvait au bord de la pelouse, sans doute choisie par la Fédération française de football pour ses récents mérites dans sa classe depuis la rentrée ou sur recommandation de son entraîneur dans un club de la banlieue dyonisienne.

Et Ludivine, dix ou douze ans au plus au vu des images de TF1, semblait d’ailleurs quelque peu tétanisée par cet honneur. A la 49e minute de jeu, le score est de zéro à zéro et l’on s’est ennuyé jusque-là comme d’habitude assez ferme devant le spectacle offert par la plus grande chaîne d’Europe et sa plus barbante vitrine en prime time : celui des Bleus de Didier Deschamps, successeur de Laurent Blanc et Raymond Domenech. La petite fille en survêtement porte un ballon en main, c’est son devoir et elle l’effectue en excellente élève. Mais elle rêvasse un peu, songeant sans doute depuis le début du match à la majesté du lieu et à ce qu’elle pourrait raconter de beau et d’inoubliable en rentrant chez elle à ses parents.

Ludivine se fait engueuler par Ribéry mais s’exécute et lui fait une passe décisive…

Et elle ne semble d’ailleurs pas dans un premier temps apercevoir Franck Ribéry qui fonce sur elle dans sa direction d’un air peu amène. Le beau et génial Franckie lui adresse même une remontrance, dont elle ne saisit pas tout de suite la signification. Un défenseur biélorusse vient de dégager un ballon dans les tribunes, et c’est elle Ludivine qui est, selon Ribéry, la détentrice évidente du ballon qui doit revenir en jeu à la place de celui qui s’est envolé. La jeune fille y met le temps, deux secondes environ, mais elle pige ce pourquoi elle se doit précisément de faire à cet endroit.

Elle se souvient alors de sa mission de base, dont on lui a fait très certainement répéter les gestes dans l’après-midi. Ni une ni deux, elle jette l’objet avec un joli style de basketteuse dans les mains du demi-dieu qui s’empresse de jouer la remise en jeu. La défense biélorusse est légèrement prise de court, ce qui suffit à la déséquilibrer l’espace d’un instant et à entraîner pour elle l’irréparable cinq secondes plus tard. Ribéry a récupéré la balle qu’il avait transmise à Benzema et l’a centrée sur Capoue qui marque le premier but des Bleus, résultat inespéré d’abord au vu de leur imagination générale et ensuite du déroulement particulier de l’opération burlesque et brinquebalante qui avait précédé…

Comme débloquée, transfigurée presque par cet épisode singulier, l’équipe de France en enchaînait dans les vingt minutes suivantes deux autres tout aussi étonnants et favorables. Un centre du Parisien Jallet se transformait en tir en pleine lucarne et un nouveau déboulé de Ribéry se concluait par un ballon piqué victorieux du Bavarois préféré de Zahia. 3-1 au final et un bilan de six points en deux matches, pour le moins flatteur mais, comme on dit, six points de pris et qui ne sont plus à prendre, surtout en vue de la suite et de la double confrontation nucléaire avec l’Espagne…

Ludivine, la ramasseuse de balle, a peut-être sauvé – provisoirement, mais l’espoir fait vivre – une équipe de France à deux balles.

Bleus, une défaite fondatrice…

Il y a des matches et des défaites plus significatives que d’autres. Celle (0-1) de l’équipe de France contre la Biélorussie en fait clairement partie. La France ne fait définitivement plus partie du gotha européen et encore moins mondial. On s’en doutait, on le savait sans se l’avouer. La qualification pour le Mondial n’a été qu’un trompe-l’œil et la suite n’a fait que confirmer tout ce qui ressemblait à une évidence.

Il ne faut plus jeter de pierres. Les Bleus ne sont aujourd’hui que ce qu’ils sont. C’est à dire une équipe qui fait ce qu’elle peut. Pas beaucoup bien sûr, mais au moins elle ne trompe personne et ne se prend pas pour une autre. Ce qui est déjà pas mal quand on se souvient de l’arrogance et des impostures dont nous avons été bassinés sous l’ère précédente.

Alors, ne nous berçons plus d’illusions. Il ne faut même plus se fixer d’objectifs irréalistes compte tenu des joueurs dont dispose Laurent Blanc. Continuer d’affirmer que la qualification pour le prochain Championnat d’Europe resterait possible serait à mon avis vide de sens. Le successeur de Raymond Domenech a eu l’intelligence dès la défaite consommée de ne pas en parler. Chaque chose en son temps. Il semble maintenant plus urgent de rebâtir. Plus exactement de bâtir. Car, soyons francs, il n’y a plus de fondations. La Biélorussie a fini de nous le démontrer après la Norvège il y a trois semaines, le Mexique, l’Afrique du Sud, l’Uruguay il y a trois mois, la Chine…

Est-il d’ailleurs injurieux de taxer cette nouvelle génération de joueurs français de moins géniale, de plus quelconque que celles de Platini ou de Zidane ? Il n’était pas pensable que les titres de gloire s’accumulent éternellement, que les talents se suivent et se ressemblent sans période de sécheresse.Blanc aura finalement plus de temps qu’il ne le croyait. Dans les deux années qui viennent, si le découragement ne l’emporte pas, l’important sera pour le « Président » d’essayer plutôt que de s’illusionner. De mettre et de remettre le métier sur l’ouvrage. L’Allemagne, la grande Allemagne, a mis six ans pour réédifier sa Mannschaft. Les Diaby, Rami, Ménes, Hoarau, Rémy, Gameiro ou M’Vila ne sont sans doute pas les meilleurs joueurs du monde. Il ne tient qu’à eux, non pas de le devenir, mais au moins de vouloir sans relâche s’améliorer. Et tant pis si ce ne sont pas eux qui feront l’équipe de France de demain. La période actuelle a un mérite, un seul, les places à prendre sont légion, c’est le moins que l’on puisse dire.