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Mais qui est vraiment Mr Joseph Blatter ?

Après le Comité International Olympique, exemple parfait d’oligarchie, la Fédération internationale de football demeure sans doute l’organisation la plus nébuleuse du monde sportif. Comme sa sœur aînée de l’olympisme, la FIFA s’acharne pourtant sans cesse à donner le change pour offrir une image positive à la jeunesse de tous les pays. Joseph Blatter (75 ans), son commandant en chef depuis la Coupe du monde 1998 en France et réélu ce 31 mai 2011, n’en est en réalité que le prédicateur, parfois contesté, et le permanent autocrate…

Car si la FIFA ne peut pas tout à fait être réduite, comme le CIO, à une secte, la comparaison brûle la langue. Ses présidents depuis l’origine se comptent sur les doigts d’une main. Et rien ni personne, à l’intérieur ou à l’extérieur, ne peut leur signaler quelque zeste de désapprobation ou de contrariété que ce soit. D’ailleurs, on l’oserait, que la légalité l’en empêcherait. La FIFA a son siège en Suisse, à Zurich, et ne peut être attaquée de par cette extraterritorialité de fait, devant aucun tribunal. Si elle commet une faute, elle se punit elle-même, si elle le décide…

Le rond Blatter est en fait une somme d’angles…

Voilà le contexte dans lequel se meut depuis 13 ans le rond, polyglotte, ingénieux, gestionnaire et népotique Joseph Blatter qui sera réélu ce mercredi à la présidence de la FIFA. Sous ses airs de petit bonhomme lisse et sans charisme, « Sepp » de son surnom, avance toujours tranquille et sûr de lui, dans le calme ou la tempête. Rien ne l’a jusqu’ici atteint sur la planète football. Et pourtant, jamais davantage que sous son autorité, la FIFA n’ a été plus ébranlée.

Les scandales, y compris ceux mentionnant son nom, ont jalonné ses trois mandats successifs. Il s’est toujours protégé à merveille, invoquant au nom des cieux, tel un père jésuitique, les grands et beaux principes qui auraient constamment animé ses actions. A la veille du vote de sa réélection, Blatter a atteint au chef d’œuvre diplomatique et politique en développant une nouvelle tactique à l’occasion de l’affaire de corruption que le Sunday Times a dévoilée il y a quelques semaines. La Coupe du monde 2022 aurait été « vendue » aux Qatari, selon les allégations du journal britannique, et les voix de deux de ses dirigeants auraient été « achetées ».

Blatter, soupçonné lui-même d’en avoir été au courant, a d’abord éliminé son principal concurrent, le Qatari Bin Hamman, opportunément suspendu pour enquête sur sa personne, puis a sorti la carte du coup de l’apocalypse après avoir si souvent argué du « Circulez, y a rien voir » : « La FIFA vacille vacille sur ses bases« , s’était-il brisé la voix mardi. Vite remis de ses émotions, le paradis, le purgatoire à tout le moins, succédait presque le lendemain à l’enfer : « Nous avons reçu des coups, moi des gifles, nous allons tirer les leçons de ces erreurs. Je suis prêt à assumer la vindicte populaire pour servir le football, je suis le capitaine, dans une période difficile de la Fifa». Les opposants, notamment les très mauvais perdants anglais du Mondial 2022, étaient muselés. Le vote pour la nomination du président  -unanime, il va sans dire- se déroulerait alors dans la plus pure et meilleure tradition de la vénérable institution.

La FIFA, vieille tradition de bonnes mauvaises manières !

Blatter est le fils spirituel de Joao Havelange, et ce seul « hasard » explique bien des choses quand on sait que le Suisse a succédé au Brésilien dont il a en même temps appris et hérité de beaucoup de « qualités ». Havelange, d’abord jouet de Horst Dassler le tout puissant patron d’Adidas, premier empire sportif du monde, puis lui-même devenu parrain intraitable du foot international, a très malignement perfectionné le système FIFA, le transformant en Casino royal. Chaque fédération nationale constituant une impitoyable machine à avaler les pièces d’or sur son territoire, l’ensemble crachant des profits colossaux.

Le génie de Blatter aura consisté à déployer son incontestable « charme » personnel pour se faire l’ami incontournable des grands de ce monde, toujours prompts à proposer leurs « services » en échange d’une Coupe du monde sur les stades de leurs concitoyens, de ses retombées commerciales immenses… D’où, en aval, les inévitables dérives, combines et autres transports de sacs de sport à double fond. Le secrétaire général de la FIFA lui-même, Michel Zen Ruffinen, en avait conçu en 2002 une certaine amertume, à la limite de l’écœurement, dénonçant publiquement une « Blatter organisation » où le général était ni plus ni moins accusé de « gérer la FIFA comme une dictature » !

Mais à la FIFA, la révolution est toujours de Jasmin. Blatter veille au mauvais grain.