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C’est philosophique, le Barça doit gagner !

On l’avait complètement oublié mais, il y a quelques décennies, le football se jouait avec dix attaquants. Le onzième était juste un incapable du jeu au pied qui portait casquette et gants et était chargé avec ses mains d’empêcher les dix fous d’en face de marquer plus de buts que son équipe.

Bref, ce football était ludique. Quelques gâte sauce sont venus alors troubler ce jeu en y apportant leur curieuse mais très efficace philosophie, celle de la défense. Quelques phénomènes du tacle, un terme nouveau et laid, sont devenus eux-mêmes des vedettes parce qu’ils parvenaient dans cet infâme exercice à éteindre les étoiles du dribble et de la feinte. Ce fut sur les terrains, dans les tribunes puis enfin sur le nouveau monde numérique, un demi-siècle de mocheté, de haines et de coups tordus.

Les deux dernières générations d’amateurs du ballon  ne connaissaient plus que ça. Et, faute d’un autre spectacle, ils en redemandaient comme on jouissait des jeux du cirque, en levant ou baissant le pouce. Triste mais médiatique et par conséquent payant.

Réjouissons-nous, le Barcelone de Messi et Cie n’est pas Chelsea…

Mais le Barça, comme Zorro à l’écran ou comme Hegel dans la pensée, selon la métaphore que l’on préfère, est arrivé. Ou plutôt revenu. Choc, révolution et questionnement universel. Quoi ! De nouveau sur cette terre une équipe de dix joueurs de champ tous passeurs, jongleurs, magiciens et buteurs ? Pas croyable, pas supportable pour les zélateurs des couloirs bloqués, des lignes de quatre ou du tacle à la carotide.

Ce mercredi devant Barcelone-Milan AC, je me suis amusé et réjoui comme jamais. Effacé, en quatre-vingt dix minutes d’un huitièmes de finale retour, le mortifère souvenir du champion de l’an passé, Chelsea, et sa tactique du béton armé. Messi et Cie n’ont pas cédé. Pas cédé à leur philosophie. Quelle sagesse !

Drogba : Viens voir le comédien !

Soit Didier Drogba est le footballeur le plus violenté d’Europe, soit une micro-tornade maléfique le poursuit partout où il est sur un terrain, soit il est devenu la seule victime d’une toute nouvelle loi de la gravité qui ne frapperait que les attaquants vêtus de bleu et portant le numéro 11 en les attirant invariablement le nez dans le gazon…

Didier Drogba s’est écroulé mercredi soir contre Barcelone une bonne dizaine de fois, multipliant les figures artistiques dans ses chutes au risque sans doute de… se faire vraiment mal. Certes, les Barcelonais ne lui ont pas fait la bise à chaque fois qu’il entrait dans leur champ de tacle. Mais les Blaugrana ne l’ont pas non plus coupé en deux. Le charmant Carles Puyol ou le doux Dani Alves lui ont bien sûr un peu caressé les tibias mais sans intention délibérée, comme cela arrive de plus en souvent, de lui briser la totalité des os de sa jambe… Mais Drogba, dès qu’il était touché ou simplement frôlé, voire ni l’un ou l’autre, finissait systématiquement à l’horizontale, arborant le visage de la souffrance du martyre ou le rictus de la victime torturée…

L’acteur Drogba joue comme un artiste à l’Opéra

Drogba n’est pas un simulateur, mesdames et messieurs. Mais un acteur, ce qui est tout à fait différent. L’Ivoirien avait clairement choisi – à quel moment de cette demi-finale Chelsea-Barcelone, avant ou pendant on ne sait pas, ni même peut-être lui – d’adopter une posture de comédien en plus de celle d’attaquant d’exception qu’il a été et demeure en quelques occasions. L’ex-Marseillais s’est selon moi senti en grande forme physique, cela s’est tout de suite vu d’après ses premières touches de balle, ce qui n’est plus si fréquent pour lui. Dans ces conditions si particulières, son degré de forme du jour allié à un match exceptionnel contre la meilleure équipe du monde dans l’ambiance surchauffée de Stamford Bridge, il s’est senti des ailes. Il a alors choisi de faire le spectacle comme il sait si bien le faire.

Son inconscient lui a soufflé au fil de ces minutes initiales où tout se jouait dans sa tête et dans ses jambes de se donner à fond, dans ses dribbles, passes, courses, duels. Y compris dans un jeu de scène aventureux dont il a le secret. Pour amplifier, comme au théâtre ou à l’Opéra, la dimension dramatique et émotionnelle de l’événement. Son choix comportait un risque, comme celui de tout pari. En l’occurrence de s’attirer les foudres de l’arbitre ou, pire encore, de se voir hué par ses propres fans si ce « cinéma » s’était mué en film de série B tant il aurait fini par sonner faux.

Mais Drogba, avec son expérience de ces rendez-vous au sommet du football, avait d’emblée perçu qu’il serait gagnant. Vis à vis de l’ensemble des éléments en jeu, homme en noir, public dans le stade et à la télévision, et surtout des adversaires sur le terrain. Tout ce beau monde a globalement été spectateur de la performance de l’artiste qui a de surcroît, comme si il l’avait deviné ou pressenti, marqué le seul but du match, synonyme possible d’une improbable qualification des Blues ! Drogba recevra-t-il son César mardi prochain au Camp Nou ?

Boudjellal, ou les 130 jours de Sodome !

J’ai longtemps hésité avant de pousser la métaphore sexuelle sur le terrain sportif. Mais l’actualité m’a finalement commandé de m’aventurer sur ce terrain ô combien délicat mais si tentant… Deux grands egos, j’oserais dire deux grandes libidos du sport, Mourad Boudjellal et José Mourinho, ont cette semaine tâté à la chose, et fait tressaillir nos sens, voire notre fondement.

« J’ai subi ma première sodomie arbitrale«  a lancé l’autre jour Mourad Boudjellal. L’affaire a fait du bruit. Les limites habituelles, pourtant de plus en plus élastiques, des convenances dans le sport, avaient semble-t-il été franchies. D’autant que ces propos graveleux pouvaient s’interpréter de surcroît par un délit d’homophobie (« Je n’aime pas ça… ») et aggravaient le cas de l’impétrant, déjà peu coutumier de réflexions de premier communiant.

Et le président du RC Toulon, malgré ses efforts médiatiques depuis huit jours pour dédramatiser ses paroles, sans vraiment apaiser le débat (« Le rugby français est raciste ») vient d’être privé (par la Ligue nationale de rugby) de banc, de couloirs, de zone presse et de vestiaires jusqu’à la fin de la saison de Top 14. Pendant cent trente jours exactement. A dix jours près, le temps imparti aux protagonistes créés par le Marquis de Sade (et repris en version cinématographique par le réalisateur Pier Paolo Pasolini) dans « Les 120 journées de Sodome » pour s’adonner aux plaisirs les plus scabreux et interdits…

L’arrière-train de Boudjellal n’a ce coup-là pas trop sifflé…

Mais Mourad Boudjellal ne sera pas interdit selon les attendus de la sanction (pour pourtant pas moins qu’une « atteinte à l’image du rugby, à l’éthique et à la déontologie sportive« ) d’exercer ses fonctions de dirigeant ni d’accès aux tribunes et donc de sa jouissance hebdomadaire, sans naturellement l’excitant de l’instrument phallique… Ses pairs (les autres présidents) ont donc à son égard fait preuve d’une certaine clémence, preuve que leurs mentalités ne sont sans doute pas au royaume d’ovalie aussi fermées que cela à la liberté de ton, voire aux images libidineuses.

On n’est pas loin, sans insister lourdement sur l’allusion, d’un retournement de situation. Boudjellal, aussi satisfait qu’ironique à l’entendu de sa sanction, s’en est presque réjoui, enfonçant le pieu (heu… le clou) à l’envi : « Ce qui les fait chier, en fait, c’est de voir ma gueule… On n’a jamais autant parlé de sodomie« ).

A propos d’activités, ou de conversations, réservées aux majeurs avertis, un autre personnage a illustré par image un peu osée une remarque faite à l’arbitre (encore eux) de la rencontre qui venait de se terminer entre le Real Madrid et Barcelone. José Mourinho, l’entraîneur madrilène, dont la patience n’est pourtant pas la vertu principale, a attendu l’homme en noir plusieurs minutes sur le parking du Nou Camp et lui a lancé un chaleureux remerciement : « Chapeau l’artiste, tu nous as bien baisés…! »

Décidément, en rugby, comme en foot, les couples, même les plus improbables, se forment.

Pire que 2011 ?… 2012 !

Toujours pareils les bilans de l’année… On vous réchauffe les plats des douze derniers mois ou on vous les ré-emballe avec du papier cadeau ou du papier-c… Et on se refait le match, façon supporter, bien sûr, parce que tout le monde est supporter…

En 2011, comme d’habitude, il y a eu du bon, du fabuleux parfois, et souvent, comme d’habitude, du mauvais, du minable, de l’exécrable même. Le caviar, c’est rare, ça n’est pas donné, faut savourer. Le FC Barcelone, c’est du beluga et on en a presque eu trop pour notre peu d’argent. Pas vraiment croyable à la limite, parce que probablement jamais vu ni gouté une telle cuisine quatre étoiles. A foutre la trouille de jouissance gustative, voire plus… Messi, Xavi, Iniesta, Villa et Cie, ce fut une orgie d’esthétisme et d’efficacité, une combinaison sans comparaison…

Bon, à part ça en foot, que du clinquant ou du décevant. En numéro 1, le PSG. Enfin, le PSG, plus vraiment. Le Paris sur Qatar. On verra plus tard si la sauce pétro-dollars prend… L’OM, lui, en capilotade, ou plutôt en travaux, stade, proprio, joueurs… Lyon, même chose ou à peu près. En Europe, année des milliardaires qui claquent tout ce qu’ils peuvent. Ils font ce qu’ils veulent, naturellement, les Abramovitch et les autres, mais ils commencent à nous fatiguer avec leur oseille… Pareil avec les télés qui font n’importe quoi, pourvu qu’ils emmerdent la concurrence ! Canal+ déconne à plein tube, Orange Sport ne sert et n’a jamais servi à rien, M6 a rappelé Thierry Roland, et voilà Al-Jazira qui déboule pour faire monter les enchères… Qui comprendra qu’on en a marre, cochons de payants, qu’on nous tonde, et qu’on finira par ne plus les engraisser…

Allez, encore du bon, du pas mal à vrai dire avec les Bleus de Thierry Dusautoir. En fait, il a fallu patienter. Énormément. Jusqu’à la finale de la Coupe du monde ! On a perdu, mais comme des chefs. Merci Marc Lièvremont, le type le plus curieux de l’ovalie, dont on ne sait si il est ou a été l’entraîneur le plus génial ou incompétent de l’histoire du rugby français. Avec sa « communication » impossible, il s’est foutu tout le monde à dos mais sans perdre son côté attendrissant… Inclassable. Pour le reste, toujours le pognon à la une. Moins qu’en foot, mais ça devient pénible.

Derniers bons points, le hand. Là, les Français font fort maintenant. De moins en moins confidentiel, le handball, grâce à Karabatic, Fernandez, Omeyer ou Barachet chez les mecs qui n’en finissent plus d’énerver leurs rivaux et Pineau ou Lacrabère chez les nénettes.

Pour le reste, des bons vieux scandales, à satiété, un par jour quasiment. Bien glauques et bien fangeux. A base de fric sale, de dopage, de putes, de maîtresses, de racisme… A droite et à gauche, relayés toujours gentiment par la Toile principalement, organe désormais le plus efficace de délation en tous genres, mais aussi reconnaissons-le, d’authentiques révélations bien utiles pour faire tomber des couronnes ou des biens « mal-acquis ». Laurent Blanc, Jeannie Longo, Yannick Noah, entre autres, se sont fait dégommer en ligne. Bien fait pour eux, diront certains, ils n’avaient qu’à pas dire ou faire des conneries plus grosses qu’eux. Le pire, c’est que les Français n’y voient que ce qu’ils veulent voir, en concluant vite, trop vite, en fait comme on leur dit de conclure… toujours la comm’, mal du siècle, du millénaire…

Pour 2012, pas d’illusion, Mourinho, Contador, Leonardo, Blatter vont poursuivre leurs numéros de cirque !

Bon, sinon ce fut en 2011 pas trop mal pour nos nageurs, athlètes ou basketteurs. Lemaitre se rapproche à petits centièmes de Bolt, l’Intouchable un poil fantasque. Baala et Mekhissi ont malheureusement fait le show qu’on ne voulait pas voir à Monaco. Lacourt fait le beau, mais attention à ne pas se « Manaudouiser »… Parker, lui, à l’inverse, a bien joué le coup en jouant à fond avec l’équipe de France et en revenant « gratuitement » à Villeurbanne. Deux ou trois mois, « pour une oeuvre », ça vous élève une stature… Il a l’air (je dis bien il à l’air) à peu près sincère, le Tony… Quant au tennis, toujours pas de Federer ou de Nadal français. On attend, on attend. On n’a que des espoirs en chocolat, du Kinder Bueno entre les sets…

Je me demande enfin si 2011 ne fut pas l’année des filles. Nos Bleues, foot, hand, judo et basket, ont été franchement jolies à voir. Au Mondial de football, ça a été franchement vibrant, mille fois mieux que Ribéry et ses potes, qui glissent, qui glissent, qui glissent…

Alors pour 2012 ? Londres, ce sera le point d’orgue de l’année sportive. Chez nous, on va en bouffer de l’espoir en bleu blanc rouge. Quand je pense que les rosbeefs nous ont piqué ces Jeux… Sinon, pas d’illusion, Mourinho devrait reprendre son train-train de vacheries à Guardiola, Leonardo claquera sans vergogne les dollars de l’émir du Qatar, Douillet ira serrer des milliers de pognes, Contador roulera les coureurs propres dans la farine et Blatter poursuivra son numéro de rois des faux-derches…

Barcelone, une équipe de virtuoses

Il y a eu le Real Madrid des années 60, l’Ajax des années 70, le Milan AC des années 90. Il y a désormais le Barça des années 2000. Le FC Barcelone est même peut-être la meilleure de toutes ces équipes de légende. La formation de Sepp Guardiola a fait passer lundi soir le Real, alors leader de la Liga, pour un club amateur, en lui passant cinq buts et en ne lui laissant que de misérables miettes de jeu.

Le plus étonnant n’est pas tant ce score que la manière étalée au Nou Camp par les Blaugrana. Les virtuoses catalans ont produit un récital d’une qualité inouïe et probablement inédite dans l’histoire du football. A l’image d’ailleurs de leurs prestations en Liga et sur la scène européenne depuis trois saisons. Les cinq buts sont tous nés d’actions collectives d’une longueur exceptionnelle dépassant parfois la minute et vingt passes consécutives. C’est la grande nouveauté du temps et véritablement la plus belle audace de Guardiola.

Comme l’équipe d’Espagne championne du monde et dont il inspire la méthode, le Barça ne fait pas la différence sur des contres ou des coups de pied arrêtés. Il la fait la plupart du temps sur son ahurissante capacité à faire tourner le ballon dans un périmètre incroyablement resserré puis à le faire ressortir par magie, par la grâce de ses lutins du milieu de terrain, Xavi, Iniesta et Busquets, très vraisemblablement le trio le plus technique et le plus ensorcelant de toute l’histoire du football.

Mais Barcelone a encore mieux. Son trio d’attaquants, mené par le divin Lionel Messi, qui, quand il ne marque pas comme face au Real, donne, offre des ballons d’or (il sera difficile de ne pas lui décerner encore cette année celui de France Foot, et si ce n’est pas lui ce sera forcement l’un de ses « frères ») à ses comparses quasiment aussi insaisissables que lui, David Villa et Pedro. Trois fois contre les Merengue, l’Argentin a délivré une passe décisive, deux fois au premier, une au second.Alors quand cette machine de rêve tourne à plein régime, l’opposition, même quand elle compte dans ses rangs Cristiano Ronaldo, Casillas, Benzema, Özil ou Sergio Ramos, avec à sa tête le renard José Mourinho, ne peut que constater les dégâts… Car Barcelone, plus que le Real, constitue sans doute l’addition la plus parfaite synthèse d’individualités au service du collectif.