Freud dirait qu’elle est atteinte du complexe d’Oedipe, ce rapport tortueux et tabou entre un enfant et son parent du sexe opposé. Marion Bartoli n’est pas heureuse, jamais. Elle souffre en permanence, c’est l’évidence. Personne ne l’a jamais vue sourire sur un court.
Tout la hante, son père bien sûr, ses défauts, son jeu, ses résultats, sa coiffure et ses tenues. Tout je vous dis. Mais elle essaie sans arrêt et tant qu’elle le peut, c’est son immense mérite, de vaincre ses répulsions, y compris d’elle-même. Rien ne lui convient a posteriori. Même pas son père, ex-futur entraîneur, qu’elle a souvent engueulé ou sommé de quitter des tribunes en plein match.
Il faut l’observer, Marion, depuis presque dix ans, adopter des tics tout faits et ridicules sur le court, avant de servir par exemple. Pour s’éviter des mouvements parasites, pour tenter de mieux se concentrer sur des gestes simples dont elle n’est jamais satisfaite. Cent fois, elle en a changé.
Walter Bartoli, père, entraîneur, dieu et diable…
Elle est aussi plus têtue que mille mules. Elle n’a écouté durant sa carrière que son Walter de géniteur, pour mieux le dédire quand sa fierté de femme surmontait son obéissance de fille.
On a essayé dix fois, à la Fédération française, de la sauver de ses tourments. De son tourment, en fait, de papa Walter, à dessein de l’amener et la ramener, sans lui pour la chaperonner, en équipe de France où son talent manque si cruellement.
Rien à faire. L’homme aime sa fille et vice et versa. Il y a quelques mois, le cordon ombilical paternel s’est manifestement détendu. On a même cru qu’il s’était rompu et qu’Amélie Mauresmo la nouvelle capitaine de Fed Cup jouerait, de loin, le rôle de maman-papa. Et que Marion allait enfin se mettre sous les ordres et conseils de coaches à peu près classiques…
Ce qu’elle a fait pendant deux mois avec trois souffre-douleurs différents, le dernier en date, Gérald Brémond, tenant à peine huit jours tant papa soi-disant absent était en fait dans les jupes de sa Marion…
Mais non. Walter est revenu. L’éternel retour du père prodigue…