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Canal+ veut-il encore du foot ?

En trois mois, Canal + a perdu la quasi-totalité de sa mainmise historique sur les droits télévisuels de la Ligue 1, littéralement bouffée par le nouvel ogre du sport mondial, le Qatar, et sa chaîne-pieuvre, Al-Jazira. Les moyens faramineux de l’émirat du Golfe ne suffisent pas à mon avis pour expliquer cette vraie fausse débâcle de la chaîne à péage…

Car Canal+, c’est clair si j’ose dire, n’est en réalité plus prêt à tout, ou presque, comme depuis plus de vingt-cinq ans, pour rester maîtresse absolue du foot français. Pendant deux décennies, Canal a « sous-payé » un football hexagonal (la Ligue Nationale de football) qui se contentait de ce qu’elle considérait comme une manne. Mais les « pigeons » se sont progressivement fait aigles (Aulas, Le Graët…) et c’est la chaîne cryptée qui a fini par se faire déplumer, jusqu’à déverser en 2005 les fameux 600 millions d’euros par an pour s’arroger une dernière fois la totalité des retransmissions des matches de L1 pendant trois saisons.

A partir de cette date, le vent a tourné. Canal s’est rendu compte de son irréalisme financier. La rentabilité non seulement s’essoufflait mais les pertes se sont accumulées. En grande partie à cause des matches à la demande, véritable robinet à pertes. Pas une rencontre en pay per view n’a jamais attiré plus de 50.000 personnes. Au total, Foot +, créée par Canal, a engendré un chiffre d’affaires bien en deçà des prévisions les plus pessimistes (80 millions d’euros par an).

Al-Jazira, vrai faux vainqueur de Canal+, va continuer à engraisser les clubs…

Et « Zorro » Al-Jazira est arrivé. Avec Charles Biétry à sa proue, meilleur connaisseur -et pour cause- des arcanes sous-terraines de négociations de droits sportifs. L’ex-patron des sports de Canal a en deux ou trois coups de lasso pris à ses « anciens amis » quatre-vingts pour cent des droits TV du ballon rond tricolore et la même proportion de ceux du foot étranger, cette fois à l’UEFA. Du travail de pro, avec l’aide, certes, d’un portefeuille à l’épaisseur sans limite. Mais comme la rentabilité à court terme ne figure pas dans son cahier des charges (le Qatar met en place une stratégie globale de communication et de développement en investissant massivement dans le sport européen et mondial, Barcelone, PSG, organisation Coupe du monde…) il va pour la modique somme de 240 millions d’euros sur quatre ans (soixante millions par an) avoir le plaisir de reprendre la commercialisation archi-déficitaire (Orange en a également fait la triste expérience) de ces fameux matches à la demande.

Quant à Canal, à qui il reste tout de même chaque samedi et dimanche, et le mardi ou le mercredi, les deux rencontres les plus alléchantes de L1 et celle de Ligue des Champions, les pleurs de façade contre le méchant Al-Jazira ne devraient pas durer. Délesté, outre de ses annuités exorbitantes, de dizaines de millions d’euros de frais techniques et de production, le groupe ne devrait pas pâtir de sa vraie fausse défaite… En terme de communication, Canal sait y faire…

La LNF, de son côté, va pouvoir poursuivre la redistribution ultra-généreuse de ses parrains et inonder les clubs professionnels français de subsides (une « aubaine » s’est exclamé Olivier Sadran, le président de Toulouse) que ces derniers brûlent toujours plus gaiement année après année. Mais c’est une autre histoire…

Pire que 2011 ?… 2012 !

Toujours pareils les bilans de l’année… On vous réchauffe les plats des douze derniers mois ou on vous les ré-emballe avec du papier cadeau ou du papier-c… Et on se refait le match, façon supporter, bien sûr, parce que tout le monde est supporter…

En 2011, comme d’habitude, il y a eu du bon, du fabuleux parfois, et souvent, comme d’habitude, du mauvais, du minable, de l’exécrable même. Le caviar, c’est rare, ça n’est pas donné, faut savourer. Le FC Barcelone, c’est du beluga et on en a presque eu trop pour notre peu d’argent. Pas vraiment croyable à la limite, parce que probablement jamais vu ni gouté une telle cuisine quatre étoiles. A foutre la trouille de jouissance gustative, voire plus… Messi, Xavi, Iniesta, Villa et Cie, ce fut une orgie d’esthétisme et d’efficacité, une combinaison sans comparaison…

Bon, à part ça en foot, que du clinquant ou du décevant. En numéro 1, le PSG. Enfin, le PSG, plus vraiment. Le Paris sur Qatar. On verra plus tard si la sauce pétro-dollars prend… L’OM, lui, en capilotade, ou plutôt en travaux, stade, proprio, joueurs… Lyon, même chose ou à peu près. En Europe, année des milliardaires qui claquent tout ce qu’ils peuvent. Ils font ce qu’ils veulent, naturellement, les Abramovitch et les autres, mais ils commencent à nous fatiguer avec leur oseille… Pareil avec les télés qui font n’importe quoi, pourvu qu’ils emmerdent la concurrence ! Canal+ déconne à plein tube, Orange Sport ne sert et n’a jamais servi à rien, M6 a rappelé Thierry Roland, et voilà Al-Jazira qui déboule pour faire monter les enchères… Qui comprendra qu’on en a marre, cochons de payants, qu’on nous tonde, et qu’on finira par ne plus les engraisser…

Allez, encore du bon, du pas mal à vrai dire avec les Bleus de Thierry Dusautoir. En fait, il a fallu patienter. Énormément. Jusqu’à la finale de la Coupe du monde ! On a perdu, mais comme des chefs. Merci Marc Lièvremont, le type le plus curieux de l’ovalie, dont on ne sait si il est ou a été l’entraîneur le plus génial ou incompétent de l’histoire du rugby français. Avec sa « communication » impossible, il s’est foutu tout le monde à dos mais sans perdre son côté attendrissant… Inclassable. Pour le reste, toujours le pognon à la une. Moins qu’en foot, mais ça devient pénible.

Derniers bons points, le hand. Là, les Français font fort maintenant. De moins en moins confidentiel, le handball, grâce à Karabatic, Fernandez, Omeyer ou Barachet chez les mecs qui n’en finissent plus d’énerver leurs rivaux et Pineau ou Lacrabère chez les nénettes.

Pour le reste, des bons vieux scandales, à satiété, un par jour quasiment. Bien glauques et bien fangeux. A base de fric sale, de dopage, de putes, de maîtresses, de racisme… A droite et à gauche, relayés toujours gentiment par la Toile principalement, organe désormais le plus efficace de délation en tous genres, mais aussi reconnaissons-le, d’authentiques révélations bien utiles pour faire tomber des couronnes ou des biens « mal-acquis ». Laurent Blanc, Jeannie Longo, Yannick Noah, entre autres, se sont fait dégommer en ligne. Bien fait pour eux, diront certains, ils n’avaient qu’à pas dire ou faire des conneries plus grosses qu’eux. Le pire, c’est que les Français n’y voient que ce qu’ils veulent voir, en concluant vite, trop vite, en fait comme on leur dit de conclure… toujours la comm’, mal du siècle, du millénaire…

Pour 2012, pas d’illusion, Mourinho, Contador, Leonardo, Blatter vont poursuivre leurs numéros de cirque !

Bon, sinon ce fut en 2011 pas trop mal pour nos nageurs, athlètes ou basketteurs. Lemaitre se rapproche à petits centièmes de Bolt, l’Intouchable un poil fantasque. Baala et Mekhissi ont malheureusement fait le show qu’on ne voulait pas voir à Monaco. Lacourt fait le beau, mais attention à ne pas se « Manaudouiser »… Parker, lui, à l’inverse, a bien joué le coup en jouant à fond avec l’équipe de France et en revenant « gratuitement » à Villeurbanne. Deux ou trois mois, « pour une oeuvre », ça vous élève une stature… Il a l’air (je dis bien il à l’air) à peu près sincère, le Tony… Quant au tennis, toujours pas de Federer ou de Nadal français. On attend, on attend. On n’a que des espoirs en chocolat, du Kinder Bueno entre les sets…

Je me demande enfin si 2011 ne fut pas l’année des filles. Nos Bleues, foot, hand, judo et basket, ont été franchement jolies à voir. Au Mondial de football, ça a été franchement vibrant, mille fois mieux que Ribéry et ses potes, qui glissent, qui glissent, qui glissent…

Alors pour 2012 ? Londres, ce sera le point d’orgue de l’année sportive. Chez nous, on va en bouffer de l’espoir en bleu blanc rouge. Quand je pense que les rosbeefs nous ont piqué ces Jeux… Sinon, pas d’illusion, Mourinho devrait reprendre son train-train de vacheries à Guardiola, Leonardo claquera sans vergogne les dollars de l’émir du Qatar, Douillet ira serrer des milliers de pognes, Contador roulera les coureurs propres dans la farine et Blatter poursuivra son numéro de rois des faux-derches…

Canal + n’est pas vraiment en droit(s) de se plaindre !

C’est un comble. Voilà que Canal + se plaint de l’arrivée d’Al-Jazira dans la cour du sport. Ben voyons, mon colon. Les larmes de crocodile du président de la chaîne cryptée, Bertrand Méheut, me font en réalité doucement marrer. Pour les oublieux ou les distraits, sachez que Canal est né en 1984 par la seule bonne grâce de François Mitterrand, sans le moindre appel d’offres et pour un bail de durée… à la carte. La présidence en avait été confiée à François Rousselet, l’ami de Tonton…

Et Canal, pendant 25 ans, a phagocyté le football français. En deux temps. D’abord presque gratuitement en profitant de l’inorganisation patente de la Ligue. Ce fut l’âge d’or de l’ère Charles Biétry, tout puissant patron des sports (foot mais aussi beaucoup de boxe) et vrai boss du foot hexagonal. Mais un certain Noël Le Graët, autre Breton, ne s’est pas laissé trop longtemps manœuvrer. Les droits de diffusion de l’ex D1 et désormais Ligue 1 ont grimpé en flèche et la chaîne (très) cryptée n’a pas eu d’autre choix pour conserver son bien, concurrence enfin autorisée, que de payer un prix chaque année plus exorbitant, voire indécent (six cents millions d’euros par saison), en grosse partie responsable de sa quasi-faillite à la croisée des années 2000 (sept cents licenciements dans le groupe).

Bertrand Méheut, le PDG de Canal +, fait la leçon à Al-Jazira… Décryptage obligatoire !

Aujourd’hui, Mr Méheut n’a aucun complexe à proclamer que depuis la semaine dernière où la chaîne qatari lui a soufflé la majeure partie de ses droits de la Ligue des Champions après avoir auparavant mis trois ou quatre doigts sur le gâteau de la Ligue 1 (Canal préservant de justesse les matches les plus juteux) : « La mauvaise nouvelle, c’est d’avoir un acteur irrationnel (Al-Jazira) économiquement« . La bonne blague. Canal n’a cessé justement, comme je l’ai dit, d’occuper une place « irrationnelle » dans le paysage du sport français ! Le plus drôle c’est que le nouveau – et plus que sérieux – rival, surgit par la grâce de l’actuel… chef de l’état, Nicolas Sarkozy, hôte tout à fait aimable des princes du Qatar, déjà par ses bons soins propriétaires du PSG, son club de coeur…

Plus croustillant encore, le nouveau patron d’Al-Jazira Sport n’est autre que… Charles Biétry, lui-même ancien responsable de ce qu’on sait mais aussi ex-président du… PSG. La vérité de la plaintive sortie de Méheut, c’est que Canal s’est fait piéger, en beauté. Je ne sais pas bien sûr ce qui s’est passé en coulisse. Mais il semble évident que le jeu a été quelque peu pipé… Sans doute ce qu’on appelle un retour de bâton !