Les re-re-voilà. Comme au temps de leur splendeur. Mais trente ans après, et comme si on ne les avait pas quittés, se toisant méchamment d’un côté et de l’autre du filet. Ivan Lendl et Yannick Noah ne s’aimaient pas. Des gars étonnants et ennemis comme pas deux.
Sortis de nulle part. Le premier d’une Tchécoslovaquie stalinisante et bunkeriséé à mort et l’autre, par son père, d’un Cameroun paupérisé encore plus à mort. Avec leur itinéraire respectif somme toute parallèle de rebelles, ils auraient pu s’entendre, ils auraient du. Faire un bout de chemin ensemble, je ne sais pas moi, contre les injustices et la faim dans le monde, les dictatures mortifères…
Non, ils ont poursuivi leur chemin de leur côté. Lendl, premier vrai millionnaire du tennis dans les années 1980, a dépensé sa fortune dans sa nouvelle patrie, les Etats-Unis, en poussant ses quatre filles à faire du golf, à chouchouter ses dogues allemands et en accumulant des milliers d’heures de… sieste. Noah est passé sans effort au show business et au statut d’icône multi-thèmes à coups de réflexions bateau mais populairement correctes. Et ils ne s’aiment toujours pas d’amour. Même s’il y a quelques mois, l’affreux lendl avouait qu’il avait revu son ex-rival. Sans visiblement de sentiments des vieux guerriers qui s’embrassent en oubliant qu’ils se sont tirés dessus…
Rien n’a changé, Lendl est haï, Noah est aimé…
Lendl n’a pas changé, Noah non plus. Ivan le terrible va pourtant revenir dans le tennis, en s’assemblant avec une autre tête de lard, Andy Murray, qui lui ressemble évidemment. C’est la surprise de cette nouvelle année 2012, parce que ce misanthrope va se mettre à une oeuvre caritative. Oui, il va aider quelqu’un, le malheureux Murray, tout autant loser que lui à ses débuts, avant de se forger un palmarès en béton construit sur un socle de préparation physique jamais vu pour l’époque. Lendl, comme sa compatriote Martina Navratilova (qu’il n’a jamais pu saquer naturellement), dévorait des nouilles en continu et passait douze heures sur les courts à répéter ses coups droits…
Mais, le plus curieux, c’est que Lendl, grand handicapé de la communication, est probablement l’homme le moins qualifié pour prodiguer des conseils à qui que ce soit. Et d’ailleurs, toujours il y a quelques mois, le recordman des semaines en tête du classement ATP de l’histoire déclarait: « Sincèrement, croyez-vous un instant que j’aimerais retourner sur le circuit pro, avec la vie que j’ai ? »
Quant au vainqueur de Roland-Garros 1983, encore moins de variations saisonnières, mais en parfait contraste. Vingt-neuf ans de frasques, de coups de gueule débridés, d’Helvétisme, de paternités… Jamais rassasié. Un Johnny Hallyday de gauche… Et, comme l’inoxydable rockeur, plus il déraille (dopage, entre autres sujets), plus il fait florès. Noah est la personnalité préférée des Français. Une sorte de mouvement perpétuel.