Il a fini par craquer. Sébastien Chabal, l’hercule des terrains, le roi de la popularité, le menhir de la pub et le chantre de la communication vient sans doute de subir le plaquage le plus sévère de sa carrière.
Ses propos livrés au JDD au sujet des arbitres du Top 14, qualifiés de « nuls », lui reviennent en pleine figure. La Ligue l’a d’abord cité à comparaître devant la commission de discipline mais c’est, surtout, sa mise à pied à titre conservatoire jusqu’au 11 mai (tiens, tiens, jour de l’annonce de la liste des 30 pour la Coupe du monde de Marc Lièvremont) qui va faire le plus de bruit.
Qu’a-t-il donc pu passer par la tête chevelue et barbue de l’icône du sport français pour taper aussi violemment sur plus, beaucoup plus, petit que lui ? Chabal est le sportif hexagonal le mieux conseillé et le plus affiné dans sa communication (blog, twitter) et pourtant il a commis un faux pas, peut-être fatal… Chabal, dont l’expression est – je l’ai pratiquée – assez sèche et pas vraiment langue de bois, s’était toujours jusque-là sorti d’affaire à son avantage. Je veux dire par là qu’il n’en est pas à son premier écart de langage, et que son image, si bien travaillée, l’avait en quelque sorte couvert aux yeux du grand public.
Les cinq lignes et demi consacrées aux arbitres dans le JDD* respirent la sincérité. Chabal pense ce qu’il dit contrairement à la plupart de ses interviews écrites et choisies (c’est à dire hors cadre de l’équipe de France), où les messages (de sympathie, d’humour…) sont subtilement introduits. D’habile message ou de savante ellipse, cette fois, il n’y en a pas eu. Les arbitres sont des zéros, ils ne sont pas professionnels, bref des moins que rien. Les éminences grises de Chabal étaient-elles en train de se dorer la pilule à Saint-Tropez durant ce week-end Pascal ? Toujours est-il que ces propos ne sont manifestement pas passées entre des mains expertes ou sous des yeux de professionnels de la communication chabalienne…
Donc, le Racing-Métro 92, qui s’est saigné financièrement pour enrôler la star mondiale de l’ovalie commerciale, n’a pas pu tourner autour du ballon et a décidé quarante huit heures après la ponte manquée de recaser sa poule aux œufs d’or dans son panier. Mise à pied conservatoire jusqu’au 11 mai. Soit quinze jours de mitard minimum en attendant la décision de la LNR. La sanction fera au moins manquer un match de Top 14, celui de la dernière journée de la saison régulière, contre le Stade Français, au nouvel arrivant du musée Grévin. Le Racing prend donc le risque de se priver de son plus beau placard publicitaire au cas où la Ligue sorte sa règle en fer, mais aussi et, surtout, de lui étaler une belle peau de banane sous les crampons avant la liste des appelés pour la Nouvelle-Zélande, dont il n’était déjà pas certain de faire partie.
Le Racing fustige plus une « communication mal avisée » que Chabal…
At last but not least, le communiqué du Racing, s’il prône la fermeté dans une certaine indulgence envers son barbu, est symptomatique de son époque. Le club, pour l’excuser en quelque sorte, va jusqu’à pointer une « communication mal avisée » de son troisième-ligne pour expliquer sa faute ! Mais qui communique ? Chabal et/ou le Racing, qui installe l’effigie de son emblème sur la page d’accueil de son site, sur la totalité de ses affiches et de manière générale à la une de l’ensemble des documents officiels du club (journal, présentation des matches…etc) ?
Bon courage, Sébastien. Bonne sortie de votre livre qui ne devrait pas vraiment pâtir de cette affaire (au fait, je me serais pas fait complètement avoir, moi ?). Et puis, et c’est sans doute le plus urgent, il vous faut rappeler toute votre petite troupe de Saint-Tropez… Ils vont avoir du boulot.* « Je dis ce que je pense: les arbitres du Top 14 sont nuls. Ils me rendent fous. Il n’y en a que deux ou trois qui sont pros. Et encore, j’aimerais savoir ce qu’ils font vraiment. Les arbitres de touche ont un boulot la semaine, et ils sont tout content d’être là le week-end. Ils n’aident pas l’arbitre central et quand ils interviennent, c’est catastrophique. »