C’est vraisemblablement le privilège unique des très grands champions. Celui de gagner des matches et des tournois, comme celui de Cincinnati, son dix-septième en Masters Series, en jouant… moyennement. Et pour dire la vérité, Roger Federer a certainement disputé sur le plan tennistique ce dimanche contre l’Américain Mardy Fish, et au regard de son ébouriffant talent, l’une des finales les moins brillantes de sa vie.
Désormais reconnu depuis sa victoire à Roland-Garros l’an dernier comme le plus grand joueur de tous les temps, le Suisse a certes conclu une semaine sans défaite dans l’Ohio, mais ce fut tout. Après deux tours passés en jouant une petite demi-heure (profitant successivement d’un abandon et d’un forfait adverses), Federer a eu le mérite de trouver immédiatement le rythme nécessaire pour faire tomber le toujours virevoltant Davydenko en quarts de finale. Puis le numéro 2 mondial aura fait le strict nécessaire contre Baghdatis en demie.
Contre Fish, le revenant des courts (de la 108e place à la 22e après ce tournoi, en l’espace de quelques mois), Federer a commis un nombre incalculable d’erreurs et s’est sorti d’affaire en toute fin de partie, après deux heures et demie d’un match soporifique, en s’octroyant le seul break du match lors de l’avant-dernier jeu (6-7, 7-6, 6-4).Alors évidemment, tout cela n’est qu’impression et sentiment. On ne s’adjuge pas un tournoi de cet acabit en poussant la baballe… Un Federer tristounet est la plupart du temps au-dessus d’un Fish, même en sur-régime. Un Federer en panne de génie conserve dans son bras un zeste de pouvoir magique suffisant pour qu’un seul coup sur un seul match opère une différence décisive. C’est injuste pour le reste du genre humain. Mais les génies ne font pas comme les autres…